La Réserve Naturelle de
Petite-Terre
Petite-Terre est un atoll composé de deux îlets, Terre-de-Haut et Terre-de-Bas, situé au large de la Grande-Terre en Guadeloupe.
C’est une réserve naturelle depuis 1998, connue pour sa faune et sa flore exceptionnelles.
Terre-de-Haut est interdite aux visiteurs pour protéger les espèces d’oiseaux rares qui y nichent, tandis qu’une partie seulement de Terre-de-Bas est accessible et offre des vues magnifiques, notamment du lagon, des iguanes et des agaves au pied du plus vieux phare des Antilles.
Les activités populaires incluent la plongée avec masque et tuba (snorkeling) pour observer les tortues, requins citrons et dormeurs, raies, et les poissons colorés dans le lagon.
Les visites sont limitées pour préserver ce paradis naturel.
Il est donc recommandé de réserver à l’avance, car en pleine saison touristique, il peut être difficile d’avoir une place au dernier moment.
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L'histoire
Des découvertes archéologiques récentes sur Petite-Terre révèlent que l’île a été peuplée pour la première fois entre 600 et 1500 après Jésus-Christ. Les tribus Arawaks et Caraïbes sont les premières connues pour avoir établi leur présence sur l’île, comme le prouvent les fragments de poterie et les outils en pierre trouvés. Ces communautés, principalement composées de chasseurs et de pêcheurs, sont celles que Christophe Colomb a rencontrées lorsqu’il a abordé l’île en 1493.
L’activité agricole sur Petite-Terre n’a commencé qu’avec l’arrivée des Européens à la fin du XVIIIe siècle, en provenance de l’île voisine de la Désirade, initiant la culture du coton. Les murs de pierre qui délimitaient autrefois les parcelles témoignent de l’organisation méticuleuse de l’agriculture à cette époque. Les ignames, les patates douces, le giraumon et les pois formaient la base de l’alimentation des premières familles de la Désirade. Leur principal défi était de collecter et de stocker l’eau de pluie, car il n’y avait pas de source d’eau naturelle pour l’irrigation ou la consommation. À l’apogée de la colonisation humaine, l’île comptait jusqu’à quatre maisons et entre quatre et sept familles y résidaient, soit de façon temporaire, soit de manière permanente.
Avec l’augmentation de la pêche et du commerce maritime, tant local qu’avec l’Europe, la nécessité de baliser et de signaler les terres est devenue essentielle. C’est pourquoi, en 1840, le premier phare de Guadeloupe a été construit sur l’île.
En 1998, Petite-Terre a été reclassée pour devenir une réserve naturelle marine et terrestre. Depuis lors, l’Office National des Forêts (ONF) gère ce petit paradis dans un cadre strict, visant à maintenir l’équilibre délicat de l’écosystème de l’île.
Le phare
Dans la période du XVIIIe siècle, la couronne française a octroyé la gestion de l’île à la noble lignée des Thionville, venus de l’île de la Désirade. En échange de ce privilège, les Thionville avaient pour mission de prévenir les naufrages des navires naviguant près de Petite-Terre. Pour ce faire, ils avaient pour coutume d’embraser d’immenses bûchers nocturnes, signalant ainsi la présence de l’île aux équipages en mer.
Le 9 juillet 1840 marque l’achèvement et l’inauguration du tout premier phare sur Petite-Terre, fruit de plusieurs années d’efforts constructifs.
S’élevant à 23 mètres de hauteur, il dominait la mer de 35 mètres. Doté initialement d’une lanterne à feu continu, il guidait les marins jusqu’à une distance de 15 miles nautiques, soit environ 27 Kilomètres.
Avec le temps, en 1934, la lanterne originelle cède sa place à un brûleur circulaire fonctionnant au pétrole. Puis, en 1965, une modernisation complète est entreprise, alignant le phare sur les standards contemporains.
La faune
L’île de Petite-Terre, un véritable jardin d’Éden pour les iguanes, abrite une population florissante de ces créatures préhistoriques. Avec plus de 10 000 individus recensés, cette île représente un sanctuaire pour environ un tiers des iguanes des Petites Antilles, aussi connus sous le nom d’Iguana delicatissima. Ces paisibles herbivores se régalent d’un buffet végétal varié, allant des feuilles de bois noir aux fruits, sans oublier les feuilles du redoutable mancenillier. Avec une espérance de vie de quinze ans et une taille pouvant atteindre 1m60 pour un poids de 3 kilos, ces iguanes sont les cousins pacifiques des iguanes verts, bien que ces derniers ne fréquentent pas Petite-Terre.
Le Bernard l’ermite, surnommé « Bernardo Bèl-Modan » et connu localement comme « Souda », est la vedette incontestée de l’île. Ces crustacés sans carapace adoptent des coquilles de burgos comme résidences mobiles et préfèrent les recoins humides de l’île pour leur habitat. Ils forment des communautés impressionnantes, parfois composées de dizaines d’individus, qui déambulent sur l’île comme de petites armées en quête d’aventures.
Enfin, l’île est le théâtre d’une diversité reptilienne avec deux espèces endémiques de lézards : l’Anolis, acrobate des arbres et chasseur d’insectes, et le Scinque, un sprinteur bronze aux lignes contrastées, qui préfère la solitude des cavités rocheuses pour ses siestes. L’Anolis, fréquent en Guadeloupe, est également un habitué de Petite-Terre, tandis que le Scinque se fait plus discret, mais non moins remarquable par sa rareté et sa vitesse malgré sa petite taille.
Plongez dans le lagon de Petite-Terre.
Un véritable aquarium naturel où foisonnent des poissons tropicaux hauts en couleur. Imaginez-vous nageant aux côtés du Chirurgien noir, élégant dans son costume d’ébène, ou du Colas, qui brille comme un soleil sous-marin. Admirez le Cardinal queue-fine, avec sa silhouette svelte et sa queue effilée, ou le Perroquet feu tricolore, qui arbore fièrement ses trois couleurs vibrantes. Ne manquez pas le poisson Ange, qui semble flotter avec grâce, ou le Coffre mouton, qui vous surprendra par sa forme unique. Et que dire de la sorbe et du poisson Trompette, deux créatures qui semblent tout droit sorties d’un conte de fées aquatique.
Mais ce n’est pas tout ! Le lagon abrite aussi des Raies majestueuses, comme la Pastenague et la léopard, qui glissent silencieusement dans les eaux cristallines. Et si vous êtes chanceux, vous pourriez même apercevoir de petits requins citron, inoffensifs tant que vous respectez leur espace personnel – pas question de jouer les pêcheurs audacieux ici !
Les crustacés ne sont pas en reste à Petite-Terre. Les Crabes jouent à cache-cache parmi les rochers, tandis que les oursins se pavanent avec leurs piquants. Et si vous avez l’œil, vous pourriez dénicher la langouste royale, reine de l’art de la dissimulation, qui vous défie de repérer ses antennes dépassant des cavités rocheuses.
Enfin, les mammifères marins vous réservent des rencontres inoubliables. Une colonie de Grands dauphins a choisi les eaux accueillantes de Petite-Terre comme résidence secondaire. Mais ce sont les tortues – les imbriquées et les vertes – qui sont les véritables stars de la côte sud de Terre de haut. Elles fréquentent assidûment les herbiers de Terre de bas, offrant aux visiteurs un spectacle naturel d’une beauté saisissante.
Les oiseaux résidents
Sur Petite-Terre, le Sucrier à ventre jaune est l’oiseau que vous remarquerez sans doute en premier. Habitant de l’ensemble du continent sud-américain, ce gourmand nectarivore ne rechigne pas à terminer vos restes de repas et peut même se risquer à grignoter sur vos ustensiles de cuisine. L’Huîtrier d’Amérique, lui, préfère la tranquillité et s’adonne à la recherche de sa pitance le long du rivage. Avec un régime alimentaire axé sur les mollusques, il fait usage de son bec allongé et solide pour forcer l’ouverture des coquilles, les secouant vigoureusement jusqu’à rompre leur muscle attachant. La Paruline jaune, inscrite sur la liste des espèces protégées de la région guadeloupéenne, se délecte d’insectes, d’araignées, de baies et a un faible particulier pour les chenilles. Vous la trouverez cachée dans les buissons denses et près des zones humides et ombragées de l’île.
Les visiteurs ailés saisonniers
Entre septembre et novembre, puis d’avril à mai, gardez l’œil ouvert pour apercevoir le Coulicou à bec jaune et le Goglu des prés durant leur périple migratoire entre les Amériques. Cependant, vous aurez probablement plus de chances de voir le Tournepierre à collier ou la Petite Sterne, qui choisissent de passer l’hiver à Petite-Terre. Le ballet rapide des Tournepierres le long du lagon, en quête incessante de crustacés et de petits poissons, ne manquera pas de vous captiver.
Un écosystème
Nichée entre Basse-Terre et la Désirade, Petite-Terre se dresse fièrement sur son socle de calcaire corallien, fruit d’une évolution lente mais assurée d’un récif corallien. Ce petit coin de paradis est un véritable trésor de la nature.
La barrière corallienne, délicate et essentielle, joue un double rôle de bouclier protecteur et de berceau de la biodiversité marine. Sur Petite-Terre, quatre variétés de coraux règnent en maîtres : l’imposant Acropora palmata, surnommé la corne d’élan, les robustes Porites porites, la gracieuse Montastrea annularis et l’intrigante Acropora prolifera.
La lagune de Petite-Terre est un véritable jardin sous-marin, divisé en deux catégories végétales : les herbiers marins, ces plantes à fleurs subaquatiques, et les algues, architectes des fonds marins. Ces deux acteurs clés offrent un festin et un abri à une multitude de poissons, crustacés et mollusques. Les lambis y trouvent un havre pour leur croissance, tandis que les tortues y dégustent leur mets favori, l’herbe à tortue (Thalassia testudinum).
Les plages de sable de Petite-Terre, dispersées au nord et à l’ouest de Terre-de-Bas, ainsi qu’à l’est et au sud de Terre-de-Haut, sont des sanctuaires pour la faune locale. Les petites plages du sud de Terre-de-Bas sont des nurseries pour les tortues marines. La flore côtière y est également florissante, avec le pourpier de mer (Sesuvium) et le romarin noir (Suriana) dominant le paysage. Plus loin, le romarin blanc, le raisinier-bord-de-mer et le cocotier consolident ce littoral. Les beach-rocks, ces imposantes dalles de roche sédimentaire, témoignent de l’histoire géologique de Terre-de-Bas.
Enfin, les salines, alimentées par l’eau de pluie et les vagues des tempêtes, sont de véritables sanctuaires pour les colonies d’oiseaux, préservant la richesse et la diversité de cet écosystème insulaire.
Petite-Terre, c’est l’histoire d’une nature qui se raconte à travers ses coraux, ses lagunes, ses plages et ses salines, un écosystème où la vie foisonne et se renouvelle, un joyau de biodiversité à protéger et à chérir.